Les investisseurs en actions voient au-delà des chiffres économiques négatifs

Geert Van Herck
Chief Strategist KEYPRIVATE
21 février 2019
4 minutes à lire
Depuis quelques mois, il n’est plus possible de nier le ralentissement de l’économie mondiale. Les indices PMI sont en baisse. Certains secteurs clés affichent un recul spectaculaire de la production. Et pourtant… depuis début 2019, les bourses augmentent. Que se passe-t-il ?
La confiance des producteurs diminue
La confiance des producteurs internationaux est l’un des indicateurs économiques les plus suivis. Avec les indices PMI de JPMorgan, publiés chaque mois par le bureau d’études IHS Markit, les investisseurs disposent d’un bon indicateur prévisionnel. Voici sa logique : si la confiance des producteurs augmente, l’économie mondiale traverse souvent une hausse de régime ; si elle diminue, il est tout aussi probable de voir l’économie mondiale se contracter. À cet égard, le seuil magique des 50 points est très important : au-dessus de 50 points, il est question d’une expansion de l’activité économique et en dessous, d’une contraction.
Le graphique 1 montre l’évolution de la confiance des producteurs du monde occidental (courbe verte : États-Unis, Europe et Japon) et des pays émergents (courbe orange : notamment la Chine, le Brésil, la Russie et l’Inde). Que remarquez-vous ? Depuis début 2018, la tendance est à la baisse, tant en Occident que dans les pays émergents. Cette évolution négative laisse clairement présager un ralentissement de la croissance économique. Mais est-ce alarmant ? Pas vraiment.
Comme vous le savez certainement, l’économie mondiale est sujette à des cycles et la confiance des producteurs a justement connu une hausse marquée en 2016 et en 2017. Il n’est pas anormal qu’une période de haute conjoncture soit suivie d’une période de basse conjoncture. En outre, vous pouvez immédiatement constater que la confiance des producteurs des deux régions n’a jusqu’à présent pas flirté avec le seuil des 50 points.
Autrement dit, une récession mondiale ne semble pas en vue !
Graphique 1 : évolution de l’activité économique

Source : IHS Markit
La production diminue encore plus vite
En revanche, la chute rapide de la production dans plusieurs secteurs clés de l’économie mondiale est un peu plus préoccupante. Le graphique 2 représente l’activité industrielle dans les secteurs technologiques, des machines et de l’automobile. Et que constate-t-on ? Depuis début 2018, l’activité de ces secteurs a très fortement diminué. Cette diminution en soi n’est pas nécessairement problématique : il s’agit en effet de secteurs très cycliques.
Mais c’est surtout la vitesse de la chute qui doit retenir notre attention. Par exemple, vous constatez que l’activité du secteur automobile est déjà passée sous le niveau des 50 points. Cela implique tout de même des risques ; le risque de contagion, pour n’en citer qu’un seul. Si l’industrie automobile va mal, ses fournisseurs sont rarement épargnés.
Graphique 2 : évolution de l’activité dans des secteurs importants de l’économie mondiale
(moyenne sur 3 mois)

Bron: IHS Markit
Et pourtant, les bourses augmentent
Malgré ces indicateurs décevants, nous constatons une augmentation marquée des cours de la bourse depuis le début de l’année. C’est pour le moins contradictoire. Une diminution de la croissance n’entraîne-t-elle pas une baisse des bénéfices des entreprises cotées en bourse ? Cette baisse est-elle du goût des investisseurs ? Alors pourquoi les bourses s’apprécient-elles ? Pourquoi les investisseurs en actions souhaitent-ils toujours acheter ?
En cherchant une réponse à ces questions, ne perdez pas de vue le fait que les bourses considèrent surtout l’avenir. Les investisseurs raisonnent comme suit : un ralentissement de la croissance permet de supposer que les banques centrales (et surtout la Fed américaine) ne relèveront plus les taux à court terme dans les mois à venir. Par conséquent, les taux à long terme diminueront aussi. C’est ainsi que l’alternative des produits à taux fixe disparaît – et que les actions font l’objet d’un afflux de nouveaux capitaux.
Voilà, selon nous, la seule explication au dynamisme actuel des marchés.